Quelles alternatives à l’activité conventionnelle ?

L’activité physique est un élément important de la prise en charge thérapeutique du diabète de type 2. Plusieurs méta-analyses récentes ont en effet confirmé qu’une activité physique structurée, en complément d’une diététique adaptée, permet une amélioration de l’hémoglobine glyquée de l’ordre de 0.5-0.7% (JAMA 2011;305:1790–9). Cette amélioration s’observe avec les exercices d’endurance, de résistance ou les programmes d’entraînement mixtes. Les différentes sociétés savantes de diabétologie recommandent une activité physique régulière chez le diabétique de type 2 pour une durée hébdomadaire minimale de 150 min/semaine. Malheureusement, l’adhésion des patients à l’activité physique prescrite est mauvaise, même dans les études cliniques, dès que l’encadrement/coaching par les professionnels de santé est allégé. Cette constatation incite à envisager des alternatives à l’activité physique conventionnelle, afin que même les patients sédentaires puissent bénéficier des bienfaits de l’activité physique. Plusieurs stratégies de recherche sont actuellement en cours autour de cette problématique. Tout d’abord, les mécanismes moléculaires mis en jeu dans le muscle après activité physique sont mieux connus et permettent d’envisager une action directe sur différentes voies de signalisation d’intérêt. Ainsi, les cibles intéressantes actuelles semblent être PPARβ (Peroxisome proliferatoractivated receptor gamma), PGC-1α (co-activateur de PPARβ) et ERRγ (Human Estrogen-related Orphan Receptor Gamma), tous trois activés par l’AMPK dont les concentrations augmentent dans le muscle en réponse à l’activité physique. L’utilisation d’agoniste de ces différentes voies modulerait favorablement le métabolisme musculaire, mimant les effets d’une activité physique. De plus, il est maintenant reconnu que le muscle est un authentique organe endocrine, l’activité physique aboutissant à une sécrétion musculaire de nombreuses cytokines (appelées myokines) qui permettent probablement une communication entre le muscle et les autres organes, notamment ceux impliqués dans la régulation métabolique. Plus de 300 myokines sont décrites à ce jour mais leur caractérisation précise est nécessaire avant d’envisager de pouvoir les utiliser en thérapeutique. Enfin, une approche complètement différente d’électrostimulation musculaire a donné des résultats encourageants dans le cadre d’une étude pilote humaine. En effet, l’idée est de remplacer l’activité physique conventionnelle par de l’electrostimulation musculaire, les contractions involontaires générées pouvant avoir un effet métabolique favorable. C’est ce qui a été montré dans l’étude Electrodiab, avec une amélioration de 25% de la sensibilité à l’insuline après un programme d’une semaine de séances quotidiennes d’électrostimulation sur les deux quadriceps (Acta Diabetol. 2014 Aug 9). Le mode d’action précis de ce bénéfice métabolique n’est pas encore bien compris et est en cours d’exploration dans plusieurs études complémentaires.

Symposium le muscle au SFD 2015

D’après le symposium « le muscle : une cible thérapeutique » Modérateurs : H. Vidal (Lyon) et F. Galtier (Montpellier)

 

Activité physique chez le diabétique de type 1 traité par pompe à insuline : comment adapter les doses d’insuline afin d’éviter un hypoglycémie ?

L’activité physique est recommandée pour les sujets diabétiques de type 1 (DT1) mais elle peut être pourvoyeuse d’hypoglycémie si le traitement n’a pas été adapté pour éviter cet événement aigu. Pour les patients traités par pompe à insuline, il n’existe pas de recommandations précises concernant l’ajustement des doses d’insuline en prévision de l’activité physique, notamment lorsque celle-ci a lieu dans les 2 heures qui suivent un repas. Faut-il réduire le débit de base ou bien le bolus ? C’est pour répondre à cette question que S. Franc et al. ont mené une étude clinique sur 20 patients DT1 traités par pompe à insuline. Chaque patient a réalisé 2 sessions d’activité physique à 50% de la VO2max, pendant 30 minutes, 90 minutes après le déjeuner. L’une des sessions a été précédée d’une réduction du bolus repas de 30 à 50% et l’autre session a été accompagnée par une réduction du débit de base de 50 à 80% pendant 2 heures à compter du début de l’activité physique. Les auteurs ont montré que la glycémie de début d’activité physique était plus élevée lorsque la stratégie « réduction de bolus » avait été appliquée. Cependant, le temps passé dans l’objectif glycémique 70-180 mg/dl était identique avec les deux stratégies. En revanche, grâce à la diminution du bolus, le temps passé < 80 mg/dl était réduit. Ainsi, chez les sujets DT1 traités par pompe à insuline, en prévision d’un activité physique dans les deux heures qui suivent un repas, il semble qu’une réduction du bolus plutôt que du débit de base réduise le risque hypoglycémique dans les heures qui suivent.
D’après O-16 : S Franc et al. Activité physique juste après un repas : vaut-il mieux réduire le débit de base ou le bolus pour limiter le risque hypoglycémique, en cas de traitement par pompe ?).

 

Impact du diabète de type 1 déséquilibré sur l’apport et l’utilisation de l’oxygène au muscle squelettique

La consommation maximale d’oxygène (VO2max) est altérée chez les patients présentant un diabète de type 1 (DT1) déséquilibré. E.Heyman et al. ont étudié les différentes étapes potentiellement impliquées dans cette anomalie, depuis la diffusion alvéolo-capillaire de l’oxygène jusqu’à son utilisation mitochondriale, en passant par son transport artériel et sa libération au niveau musculaire. Une vingtaine de patients DT1 présentant une HbA1c < 7% (bon équilibre) ou > 8% (mauvais équilibre) ont été étudiés avec mesure de la conductance de la membrane alvéolo-capillaire, mesure de l’oxygénation et de l’hémodynamique musculaire, évaluation du contenu artériel en oxygène et des variables influençant la dissociation de l’oxyhémoglobine. De plus, une biopsie musculaire a permis l’évaluation de la respiration mitochondriale. Les auteurs ont montré que la VO2max était altérée uniquement chez les patients DT1 mal équilibrés. La diffusion alvéolo-capillaire et le transport artériel de l’oxygène ne différaient pas entre les deux groupes. En revanche, les étapes ultérieures de la cascade de l’oxygène étaient altérées chez les patients mal équilibrés. En effet, chez ces sujets, l’augmentation de l’hémodynamique locale et de l’extraction musculaire d’oxygène induites par l’exercice étaient atténuées (une affinité accrue de l’HbA1c pour l’oxygène peut être évoquée pour expliquer ce phénomène). De plus, l’activité du complexe IV de la chaine respiratoire tendait à diminuer en cas d’HbA1c élevée. Le mauvais équilibre du diabète de type 1 altère donc la VO2max par des mécanismes musculaires et mitochondriaux principalement. Les sujets DT1 dont l’HbA1c est < 7% ont une VO2max identique à des sujets contrôles.
D’après O-17 : E Heyman et al. impact du diabète de type 1 et des niveaux élevés d’hémoglobine glyquée sur l’apport et l’utilisation de l’oxygène au muscle squelettique : depuis la diffusion alvéolo-capillaire jusqu’à la respiration mitochondriale.

 

Influence de l’activité physique des médecins sur le contrôle glycémique et tensionnel de leurs patients

L’activité physique régulière contribue au contrôle métabolique et tensionnel des patients diabétiques et hypertendus. L’adhésion de ces patients à l’activité physique est malheureusement modeste. Une étude française observationnelle transversale multicentrique a été menée par 126 cardiologues et 132 diabétologues afin d’évaluer le pourcentage de patients aux objectifs de PA (<140/90) et d’HbA1c (<objectif individualisé) selon leur niveau d’activité physique. Les autres facteurs associés à l’obtention du double objectif ont également été analysés. Chaque médecin a inclu 6 patients atteints de diabète de type 2 et hypertension artérielle (2 patients actifs et 4 patients sédentaires selon le questionnaire de Ricci-Gagnon). Un total de 1 766 patients a pu être étudié, dont 628 actifs et 1 138 sédentaires. Les patients actifs, comparativement aux sédentaires, étaient plus jeune (62 vs 65 ans ; p<0.001) et avaient un IMC plus bas (28.6 vs 31.7 ; p<0.001). De plus, leur contrôle tensionnel était meilleur (133/77 vs 137/79 mmHg ; p<0.001) avec moins de traitements anti-HTA (1.9±1.0 vs 2.2±1.0 ; p<0.001). Enfin, le contrôle métabolique des patients actifs était également meilleur que celui des patients sédentaires (HbA1c 7.1±0.9 vs 7.5±1.2% ; p<0.001) avec moins de traitements anti-diabétiques (1.9±0.8 vs 2.1±0.9 ; p<0.001). Le double contrôle tensionnel et métabolique était atteint deux fois plus souvent chez les sujets actifs que chez les sédentaires. Parmi les autres facteurs prédictifs de double contrôle tensionnel et métabolique, le plus fort était un médecin lui-même actif comparativement à un médecin sédentaire (odds ratio 4.02).

Ainsi, le niveau d’activité physique du médecin semble pouvoir influer sur le contrôle tensionnel et métabolique des patients, probablement par un effet motivationnel sur les mesures d’hygiène de vie.

On est d’autant plus convaincant que l’on est soit même convaincu !
D’après O-17 : E Heyman et al. impact du diabète de type 1 et des niveaux élevés d’hémoglobine glyquée sur l’apport et l’utilisation de l’oxygène au muscle squelettique : depuis la diffusion alvéolo-capillaire jusqu’à la respiration mitochondriale.

 

Inhibiteurs PCSK9 : un nouvel argument à l’encontre d’un effet diabétogène

Le contrôle du LDL-cholestérol reste une priorité thérapeutique dans le cadre du contrôle des facteurs de risque cardiovasculaire. L’efficacité des statines n’est plus à démontrer mais ne permettent pas toujours d’atteindre les objectifs de LDL-cholestérol requis. De plus, les statines entraînent souvent des effets secondaires qui peuvent conduire à l’arrêt du traitement. D’autres médicaments hypocholestérolémiants sont donc en développement et parmi eux, les inhibiteurs de PCSK9 (proprotein convertase subtilisin kexin type 9) sont actuellement testés dans des essais cliniques de phase 3. La sécurité d’emploi de cette classe thérapeutique semble pour le moment satisfaisante mais des données précliniques suggèrent un lien potentiel entre la sous-expression de PCSK9 et le risque de diabète. L’équipe du Pr Cariou a mené une étude afin de rechercher ce lien chez l’homme. Leur objectif était d’étudier le lien entre la variante perte de fonction de PCSK9 p.R46L et le risque de diabète de type 2 (DT2) chez l’homme. Pour ce faire, le variant p.R46L a été génotypé dans la cohorte DESIR (4 618 sujets dont 299 DT2) et dans la cohorte de l’hôpital Sud-Francilien (1 342 sujets DT2) et son effet sur le risque de DT2 a été analysé dans une étude cas-contrôle (cas de DT2 des deux cohortes versus sujets non diabétiques de DESIR). L’incidence de nouveaux cas de DT2 a également été analysée sur 9 années pour la cohorte DESIR. La fréquence allélique du variant p.R46L dans cette cohorte était de 0,08% et s’associait, comme précédemment décrit, à des concentrations significativement abaissées de cholestérol total, LDL-Cholestérol et apolipoprotéine B.

En revanche, ce variant ne s’associait pas à une prévalence accrue de survenue de DT2. De plus, les auteurs ont observé une tendance en faveur d’une diminution du risque de nouveaux cas de DT2 dans la cohorte DESIR.

Il n’y a donc pas dans cette étude de lien entre sous-expression de PCSK-9 et DT2, ce qui est rassurant pour le développement des inhibiteurs PCSK9.
D’après O-06 : B Cariou et al. Le mutant perte de fonction p.R46L de PCSK9 n’est pas associé à un risque accru de diabète chez l’homme.

 

Effet d’un régime hyper-lipidique et hyper-glucidique sur la néphropathie diabétique

La glycogénose de type 1 (déficience de la glucose-6 phosphatase – G6Pase) est une maladie métabolique rare qui comporte une atteinte rénale très similaire à celle observée chez les patients diabétiques. Elle associe en effet une accumulation de glucose-6 phosphate, une activation de la lipogénèse de novo et une activation du système rénine-angiotensine, aboutissant à la fibrose. Un modèle murin d’invalidation spécifique de la G6Pase au niveau rénal (souris K.G6pc-/-) a été créé pour reproduire la pathologie rénale de la glycogénose de type 1. Ces souris K.G6pc-/- ont ensuite été soumises à un régime enrichi en graisse et en saccharose (régime type « cafétéria ») pendant 9 mois. Ce régime a conduit à une accumulation accrue de triglycéride dans le cortex rénal ainsi qu’à destruction glomérulaire plus importante, évaluée en microscopie électronique. La microalbuminurie était en outre augmentée d’un facteur 2 et la fonction rénale altérée avec le régime « cafétéria », comparativement à un régime standard. Enfin, une fibrose rénale s’est développée après les 9 mois de suivi, uniquement dans le groupe régime « cafétéria ». Ces données évoquent un effet délétère d’un régime hyper-lipidique et hyperglucidique sur le développement et la progression d’une maladie rénale proche de la néphropathie diabétique. Cette étude suggère qu’une prise en charge nutritionnelle adaptée pourrait améliorer le pronostic rénal des patients atteints de néphropathie diabétique.
D’après O-15 : M Gjorgjeva et al. développement pathologique accéléré par un régime de type « cafétéria » dans un modèle murin de néphropathie.

Dr Michaël Joubert

Article publié dans le supplément du Cordiam N°6 (Mai-Juin 2015)

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