Pour vous, quelles ont été les 2 ou 3 principales avancées en cardiologie au cours des 5 dernières années ?
Je crois que beaucoup de médecins (et de patients !) répondraient le TAVI en premier. Plus de 15 ans après la première procédure réalisée chez un homme de 55 ans par le Pr Alain Cribier et son équipe, le TAVI continue de bouleverser les pratiques. Quand j’étais externe, il s’agissait d’une procédure réservée aux patients inopérables, puis les indications se sont élargies au cours de l’internat avec Partner II, et plus avec récemment Partner III et Evolut R présentées à l’ACC 2019. Eugene Braunwald a qualifié ces avancées « d’un moment historique qui doit rester dans les mémoires ».
Les anticoagulants oraux directs ont aussi transformé notre pratique, et améliorent le confort des patients. C’est une évolution majeure pour tout le monde.
Le concept récent de désescalade thérapeutique est une autre avancée qui doit être soulignée car elle est importante pour les patients. Ainsi, cette année a permis de clore définitivement le débat sur l’aspirine en prévention primaire avec les essais cliniques ASPREE, ASCEND et ARRIVE. Toujours dans l’esprit de désescalade, plusieurs essais cliniques en cours évaluent le retrait des bêtabloquants dans les suites d’un infarctus du myocarde non compliqué (ABYSS), avec des résultats qui changeront probablement nos pratiques.
Enfin, de nouvelles perspectives encourageantes et novatrices voient le jour comme le tafimidis dans l’amylose à transthyretine familiale (ATTR-ACT), ou les immuno-modulateurs dans les myocardites graves (ARAMIS).
Quelle a été votre meilleure expérience professionnelle ?
Celle que je vis actuellement comme chercheur stagiaire au Duke Clinical Research Institute, en Caroline du Nord.
Quel serait votre principal regret ?
“Amor fati” – C’est une locution de Nietzsche qui veut dire « aime ta destinée ».
Comment voyez-vous le futur ?
Avec beaucoup de challenges éthiques et technologiques.
Nous sommes dans un moment crucial où nous savons que l’intelligence artificielle va changer la pratique médicale, mais personne ne sait de quelle manière ni avec quelle envergure. L’accès au savoir s’est démocratisé grâce à internet, mais nos sociétés sont paradoxalement en proie à une crise de la désinformation médicale, notamment via les réseaux sociaux. La France est le pays le plus anti-vaccin au monde ! Et on retrouve ce scepticisme de plus en plus vis-à-vis des thérapies cardiologiques. Comment y répondre en tant que médecin ? La généralisation de l’open access et des outils critiques pourrait être une réponse. Il faut rester optimiste !
Michel Zeitouni,
Duke Clinical Research Institute