Continuing versus Suspending Angiotensin-Converting Enzyme Inhibitors and Angiotensin Receptor Blockers: Impact on Adverse Outcomes in Hospitalized Patients with Severe Acute Respiratory Distress Syndrome Coronavirus 2 (SARS-CoV-2)
Continuer ou suspendre les IEC ou les ARA2 : impact sur le pronostic des patients hospitalisés avec SARS-COV2

 

Contexte et hypothèse

 

En février 2020, les premières données émanant de Chine montraient une vulnérabilité particulière des patients atteints de maladie cardiovasculaires aux formes grave de COVID-19, en particulier les patients hypertendus. Ces observations ont fait l’objet d’un éditorial dans le Lancet et de plusieurs communications des sociétés scientifiques s’interrogeant sur une possible effet des inhibiteurs du système angiotensine sur la sévérité de l’infection au coronavirus 1.

L’hypothèse physiologique est basée sur le récepteur membranaire ACE2 – présents dans les cellules pulmonaires – qui est aussi le récepteur fonctionnel du SARS-COV2. Parce que l’expression de ce récepteur membranaire ACE2 peut être stimulée par la prise d’IEC et ARA2, des hypothèses ont été émises sur leurs effets bénéfiques ou péjoratifs dans l’évolution de l’infection COVID-19. Les premières études observationnelles sur le sujet parues en avril ont montré des résultats rassurants2

Néanmoins, l’étude randomisée BRACE-CORONA est la première à nous éclairer sur l’effet clinique de l’arrêt des IEC chez les patients infectés avec la COVID-19.

 

Critères d’inclusion

 

Patients âgés de plus de 18 ans, hospitalisés pour COVID-19, traités de manière chronique par IEC ou ARA2.
Les investigateurs de BRACE-CORONA ont exclus :

– Les patients hospitalisés pour une décompensation cardiaque dans les 12 derniers mois
– Les patients traités par plus de 3 médicaments antihypertenseurs
– Patients traités par sacubitril/valsartan
– Les patients avec une instabilité hémodynamique dans les 24 premières heures du diagnostic de COVID-19

 

Plan d’étude et traitements étudiés

 

Il s’agit d’une étude multicentrique randomisée, de phase IV, en deux bras parallèles :

– Poursuite des IEC ou ARA2 (bras contrôle)
– Arrêt des IEC ou ARA2 (bras interventionnel)

 

Critères de jugement

 

Critère principal :
Nombre de jours vivant et en dehors de l’hôpital jusqu’à 30 jours après l’inclusion

Critère secondaire :
Mortalité toute cause à 30 jours

Taille de l’échantillon et hypothèses statistiques :
En se basant sur l’étude COALIZAO, un échantillon de 500 patients permettrait de détecter une différence de 24 heures (écart type de 4 jours) avec une puissance de 90 %.

 

Population

 

Recrutement de 659 patients au Brésil entre le 9 avril et le 26 juin 2020.
La moyenne d’âge était de 55,7 ans avec 40,4 % de femmes, 31,9 % de diabétique. Les patients étaient tous hypertendus, et on comptait seulement 1,4 % de patients insuffisant cardiaques.
Enfin, 16,7 % des patients étaient sous ARA2, et 83,3 % sous IEC. Plus de la moitié des patients avaient une dyspnée à l’arrivée, dont 27 % avaient une saturation en 02 inférieure à 94 %. La sévérité clinique était jugées modérée chez 57,1 % des patients, et moyenne chez 42,9 % des patients.

 

 

Résultats

 

Critère de jugement principal :
A 30 jours, il n’y avait pas de différence significative dans le nombre de jour vie en dehors de l’hôpital.
Ratio moyen : 0,95 (0,90 – 1,01) p=0,09.
Différence moyenne : -1,1 jours (-2,33 – 0,17). (Figure)
– bras interruption IEC/ara2 : 21,9 jours (+/-8 jours)
– bras poursuite des IEC/ARA2 :22,9 (+/-7,7 jours)

Mortalité totale :
Il n’y avait pas de différence dans la mortalité toute cause à 30 jours entre les deux bras HR (95 % CI) : 0,97 (0,38 – 2,52), p=0,95

 

 

Conclusion

 

Chez les patients atteints de COVID-19, l’arrêt des IEC et ARA2 n’a pas entrainé de sortie plus précoce de l’hôpital, ni d’augmentation de la survie à 30 jours. Ces premières données rassurantes indiquent qu’il faut continuer ces traitements cardiologiques chez les patients atteints de COVID-19. Il faut noter la rapidité de mise en place de l’étude, avec un protocole développé le 21 mars et la dernière visite de patient le 26 juillet. BRACE-CORONA a inclus des patients avec une atteinte COVID-19 peu sévère en majorité. D’autres essais cliniques évaluent actuellement cette question avec des critères d’inclusion plus large, comme l’essai ACORES-2 mené par le groupe ACTION à la Pitié Salpêtrière.

 

N°35 – Sept 2020

Michel Zeitouni, Action Cœur, Pitié Salpêtrière

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