Du réel au virtuel, ce que l’on gagne, ce que l’on perd !

 

Nous terminons une année bien étrange, qui a chamboulé notre mode de vie et notre façon de travailler. La question qui va se poser, une fois l’épidémie contrôlée sera de savoir si les transformations mises en place en 2020 vont perdurer. Prenons l’exemple de la recherche clinique et de la communication de ses résultats. Depuis mars 2020, tout s’est passé par visioconférences. Certes, pour certaines réunions, cela représente plutôt un progrès. Ainsi, il y a quelques années, j’ai souvenir d’avoir fait un aller et retour à San Francisco pour une réunion de comité de pilotage d’une étude, réunion qui a duré trois heures : il faut bien le dire, c’était évidemment absurde, à tous points de vue, et remplacer une réunion physique par une télé-réunion dans un cas pareil est certainement un progrès.

Mais dans bien d’autres cas, on peut légitimement s’interroger. Ainsi, le congrès de l’AHA 2020 a été particulièrement fertile en résultats de grandes études, incontestablement une des meilleures éditions de toutes ces dernières années. Entre STRENGTH, remettant en perspective les résultats de REDUCE-IT sur les oméga-3, TIPS-3 sur l’intérêt d’une polypill en prévention dans les pays en développement, RIVER avec les résultats encourageants du rivaroxaban après bioprothèse mitrale chez les patients en fibrillation atriale, l’étude AFFIRM-HF qui confirme l’effet favorable des injections de fer chez des patients ayant une insuffisance cardiaque décompensée, ou encore FIDELIO, qui a évalué la tolérance rénale et l’intérêt clinique d’un anti-aldostérone, la finérénone, chez
des patients diabétiques insuffisants rénaux, ou bien RHAPSODY, qui montre le bénéfice spectaculaire d’un « piégeur d’IL1 α et d’IL1 β» dans les péricardites récidivantes (et j’en passe), les données passionnantes, dont beaucoup conduiront à réellement modifier notre pratique, ont été foison. Eh bien, le résultat d’un congrès virtuel est que ces études ont eu un retentissement bien moindre que ce qui aurait été le cas si le congrès s’était déroulé normalement.

L’explication en est assez évidente : lors d’un « vrai » congrès, les journalistes médicaux ou experts qui en font office sont sur place, en salle de presse ou dans les auditoriums du matin au soir. Ils rencontrent les auteurs des études, ils discutent entre eux, chacun apporte à l’autre sa vision et des débats s’installent, permettant ainsi aux un(e)s, aux autres d’avoir une approche plus riche des résultats présentés. Il est alors beaucoup plus stimulant d’essayer de transmettre ce qu’on a appris. Avec le congrès virtuel, chacun est dans son coin face à lui-même en regardant la présentation vidéo ou en lisant l’article correspondant ; pas de stimulation extérieure et, en un mot, moins d’enthousiasme pour rapporter les nouveautés.

Les moyens actuels de communication ont bien des avantages, mais rien ne remplace jamais le vrai contact humain, en particulier dès qu’il est question de médecine. Espérons que les choses reviendront vite à la normale et qu’il sera bientôt possible de réellement « vivre » les grands événements médicaux.

Un brin de satisfaction néanmoins : dans cette tourmente générale, la presse de formation est restée immuable, CORDIAM comme les autres revues, et a pu continuer malgré tout à vous informer régulièrement sur les dernières avancées cardiologiques. En attendant, passez des fêtes les plus humaines possibles dans ce contexte !

 

Nicolas Danchin

Liens d’intérêt (10 dernières années) :
Subventions de recherche : Amgen, Astra-Zeneca, Bayer, Eli-Lilly, MSD, Pfi zer, Sanofi . Honoraires pour
conférences/consultance/études : Amgen, Astra-Zeneca, Bayer, BMS, Boehringer-Ingelheim, Daiichi Sankyo,
Lilly, MSD, Novartis, Novo-Nordisk, Pfi zer, Sanofi , Servier, UCB, Vifor

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