Dapagliflozine dans l’infarctus du myocarde chez le patient sans diabète ni insuffisance cardiaque : l’essai DAPA-MI

Les inhibiteurs du sodium-glucose cotransporteur-2 (SGLT2i) ont récemment prouvé leur bénéfice sur un large éventail de paramètres cardiovasculaires et métaboliques chez les patients atteints de diabète de type 2 avec une maladie cardiovasculaire.1,2 Les SGLT2i ont également permis une réduction de la mortalité cardiovasculaire et des hospitalisations pour insuffisance cardiaque chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque avec ou sans diabète, quelle que soit leur fonction ventriculaire gauche.3,4

L’essai DAPA-MI5 a cherché à étudier l’effet de laDapagliflozine sur les paramètres cardio-métaboliques en post infarctus immédiat, chez les patients indemnes de diabète ou d’insuffisance cardiaque.

 

Méthodes

Il s’agit d’un essai international randomisé en double aveugle basé sur deux registres (SWEDEHEART – registre d’infarctus du myocarde suédois et MINAP – registre équivalent anglais). Les patients inclus étaient définis comme suit :

– Pas de diabète ni d’insuffisance cardiaque préexistante

– Infarctus du myocarde avec ou sans sus décalage du segment ST

– Altération de la fonction systolique du ventricule gauche ou onde Q sur l’ECG

– Stables hémodynamiquement.

Les patients étaient randomisés en 1/1 entre 10mg de dapagliflozine ou un placebo, une fois par jour. Le critère de jugement principal était le composite hiérarchique du décès cardiovasculaire puis non cardiovasculaire, de l’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, de l’infarctus du myocarde non fatal, de la fibrillation auriculaire/du flutter, du diabète de type 2, du stage NYHA, et de la perte de poids de plus de 5%. Les résultats étaient présentés sous la forme d’un « win ratio ». Le « win ratio » est une nouvelle approche qui permet de hiérarchiser les composants du critère composite, et ainsi donner plus d’importance aux plus graves d’entre eux. Initialement, le critère de jugement était simplement constitué du décès cardiovasculaire et des hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Devant le faible nombre d’évènements, il a ensuite été modifié pour le critère ci-dessus.

 

Résultats

Parmi les 4 017 patients inclus, 2019 étaient randomisés dans le groupe dapagliflozine et 1998 dans le groupe placebo (âge moyen 63 ans, 80% d’hommes, 70% de patients issus du registre anglais, 70% avec une FEVG entre 30-49%, 70% de STEMI).

L’analyse du principal critère composite hiérarchique a montré un bénéfice significativement plus élevé dans le groupe dapagliflozine vs placebo (win ratio 1,34 ; intervalle de confiance à 95 % [IC], 1,20-1,50 ; P < 0,001). (Figure 1) Ce bénéfice était principalement dû à l’amélioration du stade NYHA et à la perte de poids, sans réduction significative de la mortalité, des hospitalisations ou des récidives d’infarctus. Ce résultat était similaire quel que soit le sous-groupe étudié. (Figure 2) Le composite du décès cardiovasculaire ou des hospitalisations pour insuffisance cardiaque est survenu chez 2,5% des patients traités par dapagliflozine et 2,6% des patients traités par placebo (RR 0,95 ; IC à 95%, 0,64-1,40). Ce critère était le critère de jugement principal initial de l’étude, survenu plus rarement que prévu en raison des critères d’exclusion qui réduisaient le nombre de patients éligibles (pas de diabète ni d’insuffisance cardiaque), le très bon recours à la revascularisation (> 90% dans le STEMI) et peut être une diminution des ré-hospitalisations en lien avec l’épidémie de COVID au moment de l’étude.

À noter qu’aucun effet indésirable notable n’a été identifié dans aucun des deux groupes. Il existait une réduction significative du taux de diabète de type 2 de novo dans le groupe dapagliflozine.

 

Quel impact sur la pratique ?

L’essai DAPA-MI n’a pas apporté de données qui supportent une extension de la prescription des SGLT2i à une population large d’infarctus sans autre indication de SGLT2i. Néanmoins, les données soutiennent la sécurité d’utilisation de la Dapagliflozine chez les patients souffrant de syndromes coronariens aigus.

Ces résultats n’indiquent PAS l’absence de bénéfice clinique chez les patients ayant subi un infarctus et souffrant de diabète, d’insuffisance cardiaque chronique ou d’insuffisance rénale chronique, pour lesquels les SGLT2i restent un pilier du traitement médical.

Conclusion

– Chez les patients présentant un infarctus aigu du myocarde et d’une altération de la fonction ventriculaire gauche, sans diabète antérieur ni insuffisance cardiaque, la dapagliflozine a démontré un bénéfice significatif sur les critères cardiométaboliques comparée au placebo.

– Le bénéfice cardio-métabolique est constant dans tous les sous-groupes pré-spécifiés, sans alerte de
sécurité.

– Les taux d’événements étaient faibles (mortalité et ré-hospitalisations), sans différence significative
entre les groupes randomisés.

– La conception innovante de l’essai clinique basé sur deux registres a facilité le recrutement des patients
et la vérification des résultats.

 

1. Furtado RHM, Bonaca MP, Raz I, Zelniker TA, Mosenzon O, Cahn A, et al. Dapagliflozin and Cardiovascular Outcomes in Patients With Type 2 Diabetes Mellitus and Previous Myocardial Infarction: Subanalysis From the DECLARE-TIMI 58 Trial. Circulation. 28 mai 2019;139(22):2516-27.*

2. Wiviott SD, Raz I, Bonaca MP, Mosenzon O, Kato ET, Cahn A, et al. Dapagliflozin and Cardiovascular Outcomes in Type 2 Diabetes. N Engl J Med. 24 janv 2019;380(4):347-57.

3. McMurray JJV, Solomon SD, Inzucchi SE, Køber L, Kosiborod MN, Martinez FA, et al. Dapagliflozin in Patients with Heart Failure and Reduced Ejection Fraction. N Engl J Med. 21 nov 2019;381(21):1995-2008.

4. Solomon SD, McMurray JJV, Claggett B, De Boer RA, DeMets D, Hernandez AF, et al. Dapagliflozin in Heart Failure with Mildly Reduced or Preserved Ejection Fraction. N Engl J Med. 22 sept 2022;387(12):1089-98.

5. James S, Erlinge D, Storey RF, McGuire DK, De Belder M, Eriksson N, et al. Dapagliflozin in Myocardial Infarction without Diabetes or Heart Failure. NEJM Evidence [Internet]. 11 nov 2023 [cité 16 nov 2023]; Disponible sur: https://evidence.nejm.org/doi/10.1056/EVIDoa2300286.

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