Les données de l’étude IBIS-4 ne permettent pas de faire le lien entre l’évolution du cœur nécrotique des plaques sous forte doses de statines et la réalité de leur efficacité après IDM

IBIS : Integrated Biomarkers and Imaging Study

 

Dans l’étude IBIS-4 l’analyse par radiofréquence du signal ultrasonore intravasculaire était utilisée pour évaluer la diminution du risque coronarien au décours d’un IDM aigu.

Nous ne manquons pas d’études démontrant l’effet favorable des statines sur la plaque d’athérome mais aucune jusqu’à présent n’avait été réalisée en phase aiguë de l’infarctus du myocarde (IDM).

 

L’objectif de cette étude était de démontrer que l’administration d’une forte dose de rosuvastatine (40 mg) permet de réduire l’athérosclérose coronaire et en particulier les plaques à risque de rupture. Cette étude reposait sur la caractérisation par radiofréquence du signal ultrasonore recueilli lors d’une exploration pariétale intravasculaire (RF-IVUS).

 Il s’agit d’une étude internationale (5 sites en Suisse et 1 au Danemark) ayant recruté 130 patients en phase aiguë d’un infarctus du myocarde. Ce n’est pas une étude comparative mais une étude de suivi longitudinal. L’examen ultrasonore portait sur les 4 premiers centimètres au minimum des deux artères non responsables de l’IDM. La dose initiale de rosuvastatine était de 20 mg/jour pendant les 2 premières semaines et de 40 mg/jour jusqu’à la coronarographie de contrôle au 13ème mois.

 

Le critère principal d’évaluation était double avec d’une part la variation du pourcentage du volume d’athérome et, d’autre part, la variation du pourcentage du volume du noyau nécrotique.

 

Résultats

Quatre-vingt-deux patients ont pu faire l’objet de l’analyse prévue qui a porté sur 146 vaisseaux.

 Les 165 lésions observées se répartissaient en lésions fibroathéromateuses à capsule fine dans 75% des cas, lésions fibroathéromateuses à capsule épaisse dans 13% des cas et épaississement intimal pathologique (stade précoce de l’athérosclérose avec lipides extracellulaires, perte de cellules musculaires lisses intimale et infiltration macrophagique) dans 6% des cas (autres 5%). La forte prévalence des plaques à capsule fine traduit un risque élevé de rupture qui se retrouve dans la taille du noyau nécrotique.

Au terme des 13 mois, il y a eu une réduction significative du volume de l’athérome (43,95 ± 9,66% versus 43,02 ± 9,82%) soit une réduction brute de -0,9% (ic à 95% entre -1,56 et -0,25 ; p = 0,007), ce qui correspond à une régression de 13,7 mm3 (p = 0,006).

Ainsi, 85% des patients ont eu une régression de leur athérome dans une des 2 artères explorées, tandis que 56% l’ont eu dans les 2 artères. Par contre le volume du noyau nécrotique n’a pas été réduit de façon significative (21,14 ± 7,43% versus 21,02 ± 7,04) soit une réduction absolue de -0,05% (ic à 95% entre -1,05 et +0,96 ; p = 0,93). Ainsi, à en juger par la taille du noyau nécrotique (radiofréquence du signal) les auteurs de cette étude n’ont pas réussi à démontrer au niveau des tissus ou des plaques nécrotiques de changement du profil de risque d’accident aigu chez les patients traités par de fortes doses de rosuvastatine.

Chez des patients à haut risque cardiovasculaire comme les coronariens victimes d’un IDM, l’administration prolongée d’une forte dose de statine diminue bien le volume total de l’athérosclérose mais pas le volume du noyau nécrotique des plaques. Compte tenu de l’efficacité clinique largement démontrée de cette classe thérapeutique dans ce contexte, et surtout sous réserve d’un manque de puissance de cette étude, la régression du cœur nécrotique des plaques ne semble pas un bon critère intermédiaire de diminution du risque de récidive.

 

 

RÉACTION

Fractional flow reserve versus angiography in guiding management to optimize outcomes in non-ST-elevation myocardial infarction (FAMOUS-NSTEMI).

L’étude FAMOUS-NSTEMI est la première étude clinique évaluant la mesure de la réserve coronaire (FFR, Fractional Flow Reserve) chez les patients admis pour un infarctus sans sus décalage ST.

Il s’agit d’un essai multicentrique réalisé au Royaume-Unis ayant comme objectif de démontrer la faisabilité de cette technique dans cette indication pour guider la thérapeutique.  Trois cent cinquante patients ont été randomisés pour cette étude en deux groupes : revascularisation guidée par les résultats de la FFR versus revascularisation guidée les résultats de l’angiographie (stratégie conventionnelle).

Cette étude apporte plusieurs enseignements intéressants. Elle démontre tout d’abord la faisabilité et la relative innocuité de cette technique dans cette indication (0.02% de dissection liée au guide). FAMOUS-NSTEMI montre également l’impact de l’évaluation fonctionnelle des lésions sur le choix de traitement final (médical, angioplastie ou pontage). En effet, près d’un patient sur quatre a eu son traitement initial modifié après les mesures de la FFR avec une augmentation nette du traitement médical par rapport aux gestes de revascularisation (+12%).

La survenue des événements cardiovasculaires majeurs à un an était similaire dans les deux groupes (avec toutefois une tendance à plus d’infarctus péri procédure dans le groupe de la stratégie conventionnelle). Cependant, cette étude n’a pas été conçue pour évaluer le devenir clinique des patients. Ces résultats méritent donc d’être confirmés dans d’autres essais tout comme le rapport cout/bénéfices de cette stratégie.

Étienne Puymirat,
département de Cardiologie,
Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris

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