BILAN DE L’ANNÉE 2022 : L’OPINION DES EXPERTS

INFARCTUS DU MYOCARDE

Quelles sont les données les plus marquantes de 2021 – 2022 dans votre domaine ? Pour quelles raisons ?

Pour l’infarctus on peut dire que l’année 2022 a une nouvelle fois montré que les discussions ne sont jamais totalement terminées et de nouvelles données en provenance d’Asie ont rebattu certaines cartes ! Concernant l’infarctus avec lésions pluritronculaires, après l’étude française FLOWER MI publiée en 2021 dans le NEJM, une étude coréenne FRAME AMI publiée récemment dans l’European Heart Journal s’est intéressée à l’intérêt de guider l’évaluation de la lésion coronaire non coupables par FFR  versus par l’angiographie seule. Les résultats de cette étude de taille modeste (n=562 patients) sont en faveur de l’intérêt de l’utilisation de la FFR pour guider l’angioplastie. L’étude canadienne COMPLETE 2 qui portera sur plus de 5 000 patients apportera des éléments importants sur cette question qui se pose quotidiennement. Une autre étude BRIGHT 4, menée en Chine et publiée dans le Lancet a remis sur le devant de la scène une molécule que l’on croyait oubliée la bivalirudine. Cette étude s’intéresse au traitement anticoagulant de l’angioplastie primaire, elle a été conduite sur 6 016 patients et a comparé héparine non fractionnée (70 UI/kg en bolus) à la bivalirudine en bolus plus une infusion haute dose de 2 à 4H avec une prise en charge par ailleurs contemporaine de l’infarctus (voie radiale, faible utilisation d’anti GP2B 3A). L’étude est bien conduite avec un suivi de 99,7% des patients. Elle montre une supériorité de la bivalirudine sur le critère combiné mortalité et hémorragies graves. On note une réduction des hémorragies et même un avantage sur la thrombose de stent dans le groupe bivalirudine. Les recommandations à venir devraient prendre en compte ces résultats, le débat du traitement antithrombotique dans l’infarctus est relancé mais cela se traduira-t-il par une modification des pratiques, cela reste peu probable.

Est-ce que votre pratique clinique a évolué pendant cette période ?

Dans l’angioplastie primaire on peut dire que les choses sont assez établies et que nous n’avons pas observé ces deux dernières années de grands changements. On citera toute de même les études sur le COVID qui ont montré l’impact des retards à la prise en charge. Cela souligne qu’il faut continuer à travailler sur la réduction des délais et notamment les délais préhospitaliers. Sur le plan thérapeutique  on peut citer une attention plus grande sur la réduction des hémorragies avec la possible diminution de la durée de la bithérapie chez les patients à haut risque hémorragique et par ailleurs réduction de la durée de la triple thérapie (aspirine-Inhibiteur P2Y12-anticoagulant) chez les patients anticoagulés au long cours.

Attendez-vous des nouveautés importantes en 2023 ?

Deux études importantes dans le post infarctus devraient être présentées ces prochains mois et ce sont des études « d’arrêt » de médicaments ! Est-il possible d’arrêter précocement l’aspirine 1 mois après l’angioplastie d’un infarctus chez un patient traité par inhibiteur puissant des récepteurs P2Y12 ? C’est la question posée par l’étude européenne TARGET FIRST dont les inclusions devraient se terminer cette année. Est-il possible d’arrêter un traitement béta bloquant 6 mois après un infarctus chez les patients sans dysfonction ventriculaire gauche ? Le PHRC Français ABYSS piloté par le groupe ACTION et conduit sur 3 700 patients devrait nous donner la réponse sur la sécurité de cet arrêt.

Quel livre/film/série/exposition vous a le plus marqué en 2022 ?

Difficile de répondre à cette question car malheureusement j’avoue ne pas arriver à trouver le temps suffisant mais j’espère que cela va changer en 2023.

 

Guillaume Cayla,
CHU – Nîmes

Commentaire(0)