Marine Kinnel, CHU de Reims, marine.kinnel@hotmail.fr Théo Pezel, CHU Lariboisière – Unité Inserm-UMR 942, Paris theo.pezel@live.fr

Marine Kinnel et Théo Pezel, deux internes passionnés par l’IRM cardiaque, étaient présents début mai à Venise pour le congrès Euro-CMR 2019, plus grand congrès mondial d’IRM cardiaque organisé par l’ESC. Ils ont présenté au cours de deux communications orales, leurs résultats de deux grandes études menées au sein de l’Institut Cardiologique Paris Sud sous la direction du Professeur Jérôme Garot portant sur l’IRM de stress. Ils reviennent pour nous sur les points clés de cette technique performante en pleine expansion.

Principe et protocole

L’IRM de stress de perfusion utilisant un vasodilatateur (Persantine/Adénosine) est le protocole le plus communément utilisé pour le dépistage de la coronaropathie en Europe. Elle permet d’étudier le premier passage myocardique du gadolinium après une injection lente de Persantine(0,56-0,84 mg/kg), ou lors d’une injection à débit constant de 140 μg/kg/mn d’Adénosine. La présence d’un hyposignal sous-endocardique témoigne d’une hypoperfusion relative d’un territoire coronaire en ischémie par rapport aux territoires sains sous l’effet du vasodilatateur (Figure 1).

En effet, le rationnel étant que la réserve coronaire du territoire en aval d’une sténose fonctionnellement significative est diminuée avec un défaut de vasodilatation de l’artère touchée comparativement aux artères saines et donc, une arrivée moindre et retardée du gadolinium au niveau du sous-endocarde. De plus, l’IRM permet une couverture anatomique complète du VG avec une bonne résolution spatiale (2 mm). Cette séquence de perfusion est précédée d’une séquence de ciné-IRM (analyse de la contractilité globale et segmentaire) et suivie d’une imagerie de rehaussement tardif (obtenue 10 mn après l’injection de gadolinium, afin de déterminer la présence éventuelle et l’extension de foyers d’infarctus). La durée d’une IRM de stress avec l’ensemble de ces séquences est d’environ 30 mn.

Place de l’IRM de stress dans les recommandations

Les recommandations de l’ESC 2014 recommandent l’IRM de stress pour le dépistage de la maladie coronaire chez les patients symptomatiques à risque intermédiaire (grade IA), au même titre que les autres tests d’ischémie1.

IRM de stress en pratique ?

Dans quel cas demander une IRM de stress ? L’IRM de stress est utilisée dans le dépistage de coronaropathie symptomatique, et à risque intermédiaire à haut risque avec :

➢ Test d’ischémie sous maximal, litigieux ou non réalisable (limitations orthopédiques, patients âgés, limitations techniques…)
➢ ECG d’effort ininterprétable : BBG, HVG
➢ Évaluation fonctionnelle d’une sténose coronaire vue en coroscanner ou coronarographie.
➢ Suivi des patients revascularisés symptomatiques (multistentés ou pontés)

Informations pratiques données par l’IRM de stress

L’IRM permet de réaliser en un seul examen l’anatomie cardiaque, les fonctions ventriculaires gauche et droite, la recherche d’une ischémie ainsi que de la viabilité myocardique. De plus, sa valeur pronostique négative est excellente puisqu’une IRM de stress négative correspond à une survie sans évènement cardiovasculaire de 99,2 % à 3 ans 2. Enfin, le réhaussement tardif est un outil puissant de l’IRM de stress car il permet de détecter avec une haute sensibilité de petits infarctus que d’autres techniques ne détectent pas ainsi l’IRM est devenu le gold standard pour évaluer la viabilité d’un territoire.

Études évaluant les performances diagnostiques de l’IRM de stress

L’IRM de stress a une excellente corrélation avec la FFR dans l’évaluation de la sévérité d’une lésion coronaire selon plusieurs études, et ce de façon supérieure aux autres tests d’ischémie (scintigraphie et échocardiographie d’effort) (Figure 2)3,4. En effet, l’utilisation de l’IRM de stress est en pleine expansion notamment suite aux résultats de l’étude CE-MARC5 ayant démontré une performance diagnostique supérieure de l’IRM comparée à la scintigraphie (respectivement AUC= 0.89 et AUC=0.74, p< 0.0001) en utilisant la coronarographie comme gold standard.

Quels sont les avantages concrets de l’IRM de stress par rapport aux autres tests d’ischémie ?

PAR RAPPORT À LA SCINTIGRAPHIE

L’IRM cardiaque a l’avantage d’avoir une meilleure résolution spatiale avec des coupes de l’ordre de 1,5 à 2mm par rapport à la scintigraphie qui utilise des coupes de 10mm 6 ce qui permet :
➢ Réduction du nombre de faux négatifs pour les ischémies équilibrées sur lésions tri-tronculaires ou du tronc commun
➢ Absence de faux positif en cas de BBG
➢ Absence d’artéfact d’atténuation au niveau de la paroi inférieure des patients obèses ou antérieure en cas de forte poitrine

PAR RAPPORT À L’ÉCHOGRAPHIE D’EFFORT

L’IRM cardiaque permet de s’affranchir de tous les problèmes d’échogénicité : pas de limitation d’analyse de la paroi latérale.

Limites et contre-indications

Les mouvements respiratoires importants peuvent être atténués par l’utilisation d’une séquence spéciale dite « séquence temps réel », celle-ci peut être également utilisée en cas d’arythmie importante ou bien on peut se servir d’un logiciel d’exclusion des arythmies.
Contre-indications à l’IRM cardiaque : corps étranger métallique intra-occulaire, clip intra-cérébral, stimulateurs cardiaques non IRM compatible (CI relatives), neurostimulateurs, insuffisance rénale DFG < 30 mL/min, poids > 250 kg (limite de la table).
Contre-indications au stress: CMH obstructive, asthme, IC décompensée, arythmies sévères et IDM < 5 jours.
La claustrophobie constitue une contre-indication relative puisque depuis l’utilisation des nouveaux aimants avec tube large, le taux de non-réalisation des IRM pour claustrophobie a été diminué, il est < 1%.

Nouveautés en IRM de stress présentées lors du congrès Euro-CMR ?

Outre l’exploration de l’arbre macrovasculaire, l’IRM de stress est capable d’explorer également l’arbre microvasculaire par la cartographie T1, il s’agit d’une technique peu pratiquée en pratique courante, réalisée sans injection de gadolinium qui en caractérisant le tissu myocardique pixel par pixel permet un dépistage de la maladie coronaire microvasculaire avec des résultats récents intéressants, notamment chez les patients diabétiques7.

Conclusion

L’IRM cardiaque de stress s’impose ces dernières années comme l’un des examens les plus performants pour le diagnostic de maladie coronaire, sans aucune irradiation
pour le patient. Cependant, son accès reste en pratique limité en France du fait de limite logistique.

 

RÉFÉRENCES
1. ESC/EACTS guidelines on myocardial revascularization. Eur Heart J. 2014
2. Jahnkeet al. Circulation. 2007
3. Takx RAP et al.Circ Cardiovasc Imaging. 2015
4. Danadet al.Eur Heart J. 2017
5. Greenwood JP et al. CE-MARC study. Lancet. 2012
6. Greenwood JP et al. Circulation 2014
7. Liu A et al. J Am Coll Cardiol. 2018

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