Balade printanière

Cette œuvre de Barthélémy Toguo a été réalisée en 2022 sur invitation du département des Arts graphiques du musée du Louvre dans le cadre de l’exposition “Les Choses”, en écho à son œuvre monumentale “Le pilier des migrants disparus” présentée la même Cannée sous la pyramide du musée.

Artiste camerounais contemporain, Barthélémy Toguo a suivi des études d’art plastique à Abidjan puis à Grenoble et à Düsseldorf. Naturalisé français, il vit entre Paris et “Band stati on”. Située sur les hautes plaines à l’ouest du Cameroun, cette Fondation accueille des artistes en résidence et des expositions. Très engagé, il encourage le dialogue entre les arts du Nord et ceux du Sud, milite en faveur de la restitution des œuvres d’art africaines à leur pays d’origine, s’interroge et dénonce le statut des étrangers, des immigrés et la difficulté pour eux de se construire une identité. Très à l’écoute des douleurs des hommes et des menaces qui pèsent sur le monde, il est nommé artiste de la paix de l’Unesco en 2021. (“L’art est un puissant facteur de développement social et économique. La culture est une arme pour la paix”). Ses créations sont à la croisée des cultures et pour ce faire ses modes d’expression artistique sont nombreux et variés : peinture, sculpture, dessin, poterie, photographie, vidéo, installations et performances… et l’ensemble de son œuvre est maintenant présentée dans le monde entier. Le végétal occupe une place centrale dans sa vie et son œuvre. Il entreti ent une relation “fusionnelle” avec les plantes et la nature. “Balade printanière” célèbre la beauté et la nature. Une fois passé l’instant de séduction, il faut regarder de plus près, apprécier comment le dessin et la couleur sont appliqués d’un seul mouvement, traçant des arabesques qui semblent improvisées. Jamais la main ne pèse et ne s’arrête, le mouvement est souple, sorte de caresse furtive. D’un geste libre et spontané ce lavis vert fluide et dégradé représente les jambes d’une femme d’où émergent des tiges de fleur. L’objet n’est pas représenté selon les normes du réalisme mais plutôt par suggestion, par métonymie visuelle comme ce corps de femme résumé à ses jambes, esquisse de corps inachevé, amputé, aux gestes laissés en suspens et d’où naissent ces feuilles cordiformes. Dans ce thème très souvent abordé par Toguo les feuilles sont toujours en forme de cœur, prolongées par une tige crochetée. L’artiste décrit cette œuvre mieux que quiconque : ” La souffrance, la beauté font partie de mon travail. Les personnages deviennent des corps mutants végétaux qui se mettent à danser. C’est une chorégraphie avec des lianes qui bougent, des feuilles qui se touchent, des corps qui se prolongent”. Les fleurs sont des indices de la célébration poétique de la vie. Quand il n’y a plus de plantes, c’est la mort.

Pascal Guéret, Boulogne-Billancourt

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