Regards croisés : comment j'utilise les analogues du GLP1 en cardiologie en cabinet

Depuis plus de 10 ans les analogues du GLP1 sont devenus incontournables dans la prise en charge du diabète et dans l’excès de poids. Outre leurs puissants pouvoirs diminuant la glycémie sans donner d’hypoglycémie, ils diminuent les complications de la microangiopathie.

 

Ils partagent avec les inhibiteurs du SGLT2 une action favorable sur la mortalité cardiovasculaire et le poids. De plus, les analogues du GLP1 et les inhibiteurs du SGLT2 réduisent le taux d’événements cardiovasculaires et rénaux au-delà de leur capacité à réduire la glycémie. Pour des populations parti culières, en prévention secondaire mais aussi primaire, ils sont capables de diminuer la mortalité cardiovasculaire avec un nombre de patients à traiter pour éviter un événement de 60 et 250 selon les études et les événements1, 2, 3. Les effets indésirables sont essentiellement digestifs, dominés par les nausées, les vomissements et la constipation. Ils surviennent en général au début du traitement ou à l’augmentation des doses. Il est donc important de commencer la prescription par de faibles doses. Les contre-indications sont limitées au cancer médullaire de la thyroïde, la grossesse, l’allaitement.

 

Leur place est bien défi nie par les recommandations internationales4 et prise de position récente des diabétologues français5.

 

Ils sont à prescrire avant la mise à l’insuline dans le diabète de type 2 et pour les pati ents avec maladie cardiovasculaire établie.

Malgré leurs effets bénéfiques avérés, leur prescription reste insuffisante6, 7 pour plusieurs raisons, parmi lesquelles :

– La nécessité de faire des injections, à expliquer et démystifier par rapport à l’insuline,

– La méconnaissance, voire le mésusage7 de nombreux praticiens et l’inertie face aux nouveaux traitements,

– La complexité des remboursements dans l’excès de poids,

– La complexité des dosages, des noms, de l’efficacité sur le poids, du nombre d’injections.

 

Les molécules

Dans ce point de vue, je présente ma prescription en tant que cardiologue.

Pour quel profil de patients vus en cardiologie ?

Le patient idéal est une pati ente atteinte de diabète de type 2 qui veut perdre du poids et qui a un antécédent cardiovasculaire athéromateux. J’ai souvent affaire à une pati ente motivée et demandeuse, d’autant que de nombreux médias ont récemment parlé de ces molécules.

Plus difficile est le pati ent non équilibré, avec une maladie athéromateuse, et qui ne demande rien. Compte tenu de l’efficacité de ces médicaments, il est important de le repérer pour ne pas lui faire perdre de chances d’améliorer son profil de complications, en améliorant au moins un des trois objectifs poids, HbA1c et complications. Il faut bien se rappeler que, pour le risque d’accident vasculaire cérébral, seuls les analogues du GLP1 ont montré une efficacité.

 

Les indications déconseillées pour le moment

Comme dit dans l’introduction ce médicament est contre indiqué de manière théorique en cas de cancer médullaire de la thyroïde car il possède des récepteurs pour le GLP1. C’est évidemment un cas assez exceptionnel.

En cas de prise d’inhibiteurs DPP4 (sitagliptine, …) il est recommandé l’arrêt de ces molécules à l’initiation du traitement.

Pour les inhibiteurs du SGLT2 (dapagliflozine,empagliflozine), il est préférable actuellement d’éviter leur prescription en association sauf en cas de maladie rénale associée ou d’insuffisance cardiaque. Il existe un flou dans les recommandations de la sécurité sociale car ces médicaments peuvent être prescrits pour des patients non diabétiques ayant une glomérulopathie ou une insuffisance cardiaque. Les études combinant les analogues du GLP1 et les inhibiteurs du SGLT2 sont rares et ne semblent pas montrer de contre-indications, ni d’effet synergique pour le moment.

 

Comment faire la prescription ?

Dans tous les cas, il faut passer un peu de temps avec le pati ent pour lui expliquer que ce sont les injections qu’il peut apprendre à faire lui-même, ou passer au début par une infirmière, son pharmacien ou en regardant des tutoriels sur internet. Les injections sont à faire de préférence le soir dans les mêmes territoires que l’insuline. Elles sont peu ou pas douloureuses. Ce n’est pas de l’insuline et cela n’occasionne aucune prise de poids, ni hypoglycémie. Par contre, des nausées voire des vomissements peuvent apparaître à la première injection et ne doivent pas inquiéter le pati ent car cela disparaît en général aux injections suivantes ou lors du retour à une dose inférieure, lorsque la posologie a été augmentée. Enfin ce traitement si bien toléré, doit suivre une progression posologique différente selon les molécules allant de 1 semaine à 1 mois. Il ne faut pas oublier d’inscrire sur l’ordonnance l’arrêt des autres médicaments si nécessaire et faire la prescription de l’infirmière si nécessaire séparément.

 

Ordonnance type

– 1 stylo « Nom du traitement »

– Une injection sous-cutanée par jour ou semaine pendant 2 ou 4 semaines

– Puis augmenter par palier de 2 à 4 semaines jusqu’à la dose maximale autorisée

– A chaque injection, maintenez l’aiguille dans la peau pendant 6 secondes

Ordonnance soins infirmiers

Injections de « Nom du traitement » à réaliser par une IDE à domicile, une injection par jour ou par semaine pendant un mois et apprendre à la pati ente/au pati ent à réaliser l’injection seule.

 

L’auteur déclare les liens d’intérêts suivants : Bayer, Novo Nordisk, Servier, AstraZeneca.

RÉFÉRENCES :

1. Satt ar N et al (2021) Cardiovascular, mortality, and kidney outcomes with GLP-1 receptor agonists in pati ents with type 2 diabetes: a systemati c review and meta-analysis of randomised trials The Lancet Diabetes & Endocrinology

2. Palmer, S. C., Tendal, B., Mustafa, R. A., Vandvik, P. O., Li, S., Hao, Q., … & Strippoli, G. F. (2021). Sodium-glucose cotransporter protein-2 (SGLT-2) inhibitors and glucagon-like peptide-1 (GLP-1) receptor agonists for type 2 diabetes: systemati c review and network meta-analysis of randomised controlled trials. Bmj, 372.

3. Xia, L., Shen, T., Dong, W., Su, F., Wang, J., Wang, Q., … & Fang, Y. (2021). Comparative efficacy and safety of 8 GLP-1RAs in pati ents with type 2 diabetes: A network meta-analysis. Diabetes Research and Clinical Practice, 177, 108904.

4. ElSayed, N. A., Aleppo, G., Aroda, V. R., Bannuru, R. R., Brown, F. M., Bruemmer, D., … & Gabbay, R. A. (2023). 9. Pharmacologic Approaches to Glycemic Treatment: Standards of Care in Diabetes—2023. Diabetes Care, 46(Supplement_1), S140-S157.

5. Darmon, P., Bauduceau, B., Bordier, L., Detournay, B., Gourdy, P., Guerci, B., … & Vidal-Trecan, T. (2021). Prise de positi on de la Société Francophone du Diabète (SFD) sur les stratégies d’utilisation des traitements anti -hyperglycémiants dans le diabète de type 2–2021 Médecine des Maladies Métaboliques, 15(8), 781-801.

6. Morton, J. I., Marquina, C., Shaw, J. E., Liew, D., Polkinghorne, K. R., Ademi, Z., & Magliano, D. J. (2022). Projecting the incidence and costs of major cardiovascular and kidney complications of type 2 diabetes with widespread SGLT2i and GLP-1 RA use: a costeffectiveness analysis. Diabetologia, 1-15.

7. Burki, T. (2022). Social media and misinformation in diabetes and obesity. The Lancet Diabetes & Endocrinology, 10(12), 845.

8. https://ansm.sante.fr/tableau-acces-derogatoire/wegovy-soluti on-injectable-en-stylo-prerempli consulte le 16 Janvier 2023

9. https://www.has-sante.fr/jcms/p_3282761/fr/rybelsus-7-14-mg-semagluti de consulte le 16 Janvier 2023

10. https://www.vidal.fr/medicaments/saxenda-6-mg-ml-sol-inj-en-stylo-prerempli-154465. html consulte le 16 Janvier 2023

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