Chéri Samba, l’artiste au grand cœur

Né en 1956 dans ce qui est devenu la République Démocratique du Congo, Samba wa Mbimba N’zingo Mbasi choisit le nom d’artiste de Chéri Samba. Talentueux autodidacte, il a commencé à peindre dans les années 70 et est maintenant exposé dans le monde entier. La collection de Jean Pigozzi vient d’être actuellement présentée au musée Maillol à Paris.

Le choix de ce prénom en dit beaucoup sur le personnage au grand cœur, revendiquant le caractère populaire en non pas naïf ni populiste de sa peinture, simple mais pas simpliste, figurative et narrative, qu’il souhaite accessible au plus grand nombre. Il se présente comme peintre politique et porteur de messages, traitant souvent avec humour les sujets sociétaux qu’il juge inquiétants, dénonçant les conflits armés et l’arbitraire des frontières, plaidant pour l’écologie, interpelant les consciences, questionnant comme dans l’œuvre présentée ici la place des femmes dans les sociétés occidentales et africaines. « Je peins des tableaux ouverts à tous, pour que le peuple s’y reconnaisse ». Pour ce faire, il se représente très souvent dans ses tableaux, sorte d’autoportraits illustrés lui faisant adopter un rôle de prédicateur qui interpelle le public. « Ce qui est dit à propos de ma peinture ne cesse de me revenir aux oreilles et j’aime entendre ces choses-là. Je suis né artiste au monde et je reste artiste du monde ».

Ses rapports avec la femme sont variés, complexes, abordés à travers des évocations personnelles ou des thèmes plus universels. Très rarement représentée seule, la femme, au foyer ou active, mère, épouse, maitresse, occupe une place centrale dans son imaginaire.

Très attaché à son épouse légitime il lui arrive de faire allusion à ses « deuxièmes bureaux », terme utilisé en Afrique francophone pour désigner une maitresse. Chéri Samba introduit très souvent des textes dans ses tableaux, des titres à rallonge, manière pour lui de contraindre le spectateur à rester plus longtemps devant la toile.

À plusieurs titres Quelle solution pour les hommes, les femmes étant beaucoup plus nombreuses sur la terre ? est donc un tableau assez représentatif de son travail. Du propre cœur de « Chéri » au sein duquel se pressent plusieurs visages féminins émergent des vaisseaux artériels qui alimentent un autre cœur où à la place duquel figure un visage de femme souriant. Sur un fond de ciel en dégradé de bleu, lui-même se représente le regard grave et préoccupé par le sujet évoqué. Le globe terrestre centré sur le continent africain semble ceint d’une couronne de fleurs multicolores qui, à y regarder de plus près, est constituée de plusieurs personnages féminins en habits coutumiers. L’ensemble est immédiatement compréhensible par le spectateur, la gravité du thème n’interdisant pas une représentation très colorée. La femme africaine est le pilier de la société. Il les tient toutes dans son cœur.