Congrès CODIA 2016

Le diabète de type 2 est associé à une dyslipidémie particulièrement athérogène (Figure 1) qui contribue à l’élévation du risque cardiovasculaire et dont la prise en charge est complexe.

Dyslipidémie athérogène du diabète de type 2.

Les recommandations internationales proposent un traitement par statine pour une grande majorité de diabétiques.(1,2)

Pour l’ESC, un traitement par statine est recommandé chez les diabétiques (DT1 ou DT2) à très haut risque (prévention secondaire ; insuffisance rénale sévère ; ≥ 1 FRCV associé et/ou atteinte d’un organe cible). L’objectif est un LDL-C ≤ 0,70 g/L ou, à défaut, une diminution ≥ 50%. Pour les patients avec DT2 à haut risque (sans FRCV ni atteinte d’organe cible), l’objectif est un LDL-C ≤ 1,0 g/L. Avec un niveau de preuves plus faible, un traitement par statine peut être considéré chez les patients avec DT1 quel que soit leur taux basal de LDL-C. Les recommandations US sont assez proches mais préconisent des statines de forte intensité (surtout entre 40 et 75 ans) et avec plus de prudence chez le sujet âgé (≥ 75 ans).(2) Ces recommandations US n’indiquent pas d’objectif précis de LDL-C et, de ce fait, ne prennent guère en compte la variabilité de réponse au traitement. Or, les patients peu répondeurs ont un moins bon pronostic CV(3) et le risque d’avoir un évènement CV majeur sous statine est directement lié au taux de LDL-C atteint.(4) Il faut donc évaluer la réponse individuelle à un traitement par statine pour, éventuellement, envisager un traitement hypolipémiant complémentaire.

L’ézétimibe a un mécanisme d’action spécifique. Des données génétiques récentes ont suggéré que l’ajout d’ézétimibe à une statine devait a priori conduire à une réduction du risque de maladie coronaire.(5) La preuve de ce bénéfice additionnel n’a été apportée que récemment par l’étude IMPROVE-IT chez des patients après un syndrome coronaire aigu.(6) Par comparaison à un traitement par simvastatine 40 mg seule, l’association ézétimibe 10 mg / simvastatine 40 mg a permis d’abaisser le LDL-C de 24% et de réduire les évènements CV majeurs (HR 0,936 ; p=0,016), bénéfice qui correspond à celui attendu à partir des méta-analyses CTT.(7) Dans cette étude, le sous-groupe diabétiques a plus bénéficié de l’addition d’ézétimibe (réduction de risque absolue 5,5% contre 2,0% dans la population générale).(6) Ces données laissent présager de la place croissante que devrait prendre l’association ézétimibe/statine dans la prise en charge de la dyslipidémie du patient diabétique, en particulier en prévention secondaire.

Chez le patient diabétique, comme chez le non-diabétique, un fibrate n’est indiqué qu’en cas d’intolérance démontrée aux statines ou d’hypertriglycéridémie sévère. Seul le fénofibrate peut être associé à une statine. Dans l’étude ACCORD-Lipid c’est surtout le sous-groupe des diabétiques avec TG élevés et HDL bas qui en a tiré bénéfice.(8) Cette association peut donc être proposée chez les patients bien contrôlés en termes de LDL-C, mais avec l’objectif secondaire non-HDL-C non atteint, conséquence d’une élévation des taux de lipoprotéines riches en TG.

De nouvelles stratégies visent à mieux normaliser la dyslipidémie du diabétique. En termes d’abaissement des LDL plasmatiques, la classe des inhibiteurs de PCSK9 est la plus prometteuse avec deux anticorps monoclonaux déjà approuvés, alirocumab et évolocumab, dont l’efficacité biologique est globalement équivalente chez les diabétiques et les non-diabétiques. Versus placebo, l’abaissement du LDL-C va jusqu’à 60% en addition à une statine alors que versus ézétimibe, il est de l’ordre de 30 à 40%. Les études de prévention CV en cours devraient préciser la place de cette nouvelle classe thérapeutique. Plusieurs classes sont en développement comme, par exemple, les inhibiteurs de ApoC3 mais il est encore trop tôt pour savoir quelle pourrait être leur place, en particulier pour des patients diabétiques. Enfin, l’avenir de la classe des inhibiteurs de la CETP est directement dépendant de l’étude REVEAL qui pourrait, en 2017, préciser si l’élévation majeure du HDL-C (avec baisse complémentaire du LDL-C) peut se traduire par une baisse du risque CV.

Michel Farnier, Dijon

Liens d’intérêts : Le docteur Michel Farnier déclare avoir reçu des honoraires en tant qu’investigateur, expert scientifique et/ou conférencier de la part des firmes suivantes : Abbott/Mylan, Amgen, AstraZeneca, Eli Lilly, Genzyme, Kowa, Merck and Co, Pfizer, Roche, Sanofi/Regeneron et Servier.

 

RÉFÉRENCES

1. Authors/Task Force M, Ryden L, Grant PJ, et al. ESC Guidelines on diabetes, pre-diabetes, and cardiovascular diseases developed in collaboration with the EASD: the Task Force on diabetes, pre-diabetes, and cardiovascular diseases of the European Society of Cardiology (ESC) and developed in collaboration with the European Association for the Study of Diabetes (EASD). Eur Heart J 2013;34:3035-87.

2. American Diabetes A. 8. Cardiovascular Disease and Risk Management. Diabetes Care 2016;39 Suppl 1:S60-71.

3. RidkerPM, MoraS, RoseL, GroupJTS. PercentreductioninLDLcholesterolfollowinghigh-intensitystatintherapy: potential implications for guidelines and for the prescription of emerging lipid-lowering agents. Eur Heart J 2016.

4. Boekholdt SM, Hovingh GK, Mora S, et al. Very low levels of atherogenic lipoproteins and the risk for cardiovascular events: a meta-analysis of statin trials. J Am Coll Cardiol 2014;64:485-94.

5. Ference BA, Majeed F, Penumetcha R, Flack JM, Brook RD. Effect of naturally random allocation to lower low-density lipoprotein cholesterol on the risk of coronary heart disease mediated by polymorphisms in NPC1L1, HMGCR, or both: a 2 x 2 factorial Mendelian randomization study. J Am Coll Cardiol 2015;65:1552-61.

6. Cannon CP, Blazing MA, Giugliano RP, et al. Ezetimibe Added to Statin Therapy after Acute Coronary Syndromes. N Engl J Med 2015;372:2387-97.

7. Baigent C, Keech A, Kearney PM, et al. Efficacy and safety of cholesterol-lowering treatment: prospective meta-analysis of data from 90,056 participants in 14 randomised trials of statins. Lancet 2005;366:1267-78.

8. Ginsberg HN, Elam MB, et al. Effects of combination lipid therapy in type 2 diabetes mellitus. N Engl J Med 2010;362:1563-74.

Article publié dans le supplément du Cordiam N°12 (Juin 2016)

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