L’écho médiatique accordé aux agonistes de GLP1, et particulièrement au sémaglutide, en tant que médicaments permettant de lutter contre l’obésité a été extraordinaire, entraînant des utilisations hors AMM qui ont alerté les autorités de santé au point que la prescription en est réservée aux endocrinologues, diabétologues et nutritionnistes. Les cardiologues ont peut-être été choqués de rester sur la touche, mais cela devrait avoir le mérite de nous conduire à reconsidérer le surpoids et l’obésité en tant que facteurs de risque.

À cet égard, la publication dans le New England Journal of Medicine, en fin d’année dernière, de l’étude du consortium sur l’évaluation des facteurs de risque cardio-vasculaires rappelle des données épidémiologiques d’autant plus intéressantes qu’elles concernent une population de plus d’un million et demi de sujets, provenant de 112 cohortes dans 38 pays et 8 régions géographiques. Ce qui donne aux résultats une portée quasi- universelle. Le lien entre différents facteurs de risque potentiels et à la fois la mortalité globale et la survenue d’accidents cardio-vasculaires a été étudié avec un suivi d’environ 10 ans. Sans surprise, on retrouve que le tabac ou le diabète doublent le risque de complications cardio-vasculaires et la mortalité. Mais pour ce qui est de l’IMC, la relation est plus subtile.

Sur l’ensemble de la population étudiée, on observe une courbe en U typique : le risque de décès et de complications cardio-vasculaires le plus faible est observé pour un IMC situé un peu au-dessus de 25 kg/m2, il s’élève pour des IMC plus bas, particulièrement en dessous de 20kg/m2 et monte aussi quand l’IMC dépasse 30kg/m2, rejoignant le risque d’un IMC très bas seulement pour des IMC de 40kg/m2. La relation est identique pour les hommes et les femmes. On pourrait évidemment se dire que le pronostic sombre d’un IMC bas est pour l’essentiel lié à la dénutrition telle qu’elle peut être présente dans les pays du Sud. L’analyse des cohortes par régions montre que ça n’est pas le cas : en Europe de l’Ouest, le risque d’événements cardio-vasculaire est minimum pour un IMC compris entre 20 et 25, il monte un peu entre 20 et 30 et est équivalent pour des IMC > 30kg/m2 et < 20kg/m2.

Pour ce qui est de la mortalité globale, en Europe de l’Ouest, le risque le plus faible appartient à la catégorie traditionnellement considérée comme le surpoids (entre 25 et 30kg/m2) ; en dessous de 25 kg/m2, le risque s’accroît et en dessous 20kg/m2, le risque de décès dans les 10 ans est considérablement plus élevé qu’au-dessus de 30kg/m2.

Si l’évolution actuelle vers une augmentation constante de l’IMC est effectivement préoccupante par les proportions extrêmes qu’elle prend (aux USA, la prévalence de l’obésité chez les adultes est passée en 20 ans de 30,5% à 41,9%), elle ne devrait pas conduire à se désintéresser des phénomènes inverses, anorexie ou dénutrition, quels qu’en soient les déterminants.

En tout cas, pas d’affolement pour ce qui est du simple surpoids, sauf peut-être pour des considérations esthétiques… À l’occasion des fêtes, précipitez-vous donc sur la chronique « Au cœur de la gastronomie » de Jacques Gauthier et n’hésitez pas à vous lâcher (au moins un peu) sur les repas à venir !

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